LE MANDAT A EFFET POSTHUME

LE MANDAT A EFFET POSTHUME

Dans un précédent article présentant le tiers administrateur, nous avions évoqué que ses fonctions cesseraient à la majorité de l’enfant. Or, dans certains cas, il peut être utile que cela ne soit pas le cas. Le mandat a effet posthume est une disposition complémentaire qui permettra donc d’aller au-delà de cet âge charnière que sont les 18 ans d’un enfant.

Le mandat à effet posthume a été une des innovations de la loi du 23 juin 2006 portant réforme du droit des successions. Il permet au défunt de désigner, avant son décès, un mandataire chargé, à compter de l’ouverture de sa succession, d’administrer et de gérer tout ou partie des biens la composant en lieu et place de tout ou partie de ses héritiers tout en agissant dans l’intérêt de ces derniers. C’est donc, non seulement un véritable outil de prévoyance mais aussi un mandat d’anticipation basé sur la confiance qu’accorde le mandant à son mandataire. Ce dernier peut être tant une personne physique qu’une personne morale, civilement et juridiquement capable d’accomplir les missions qui lui auront été confiées et qu’il aura expressément acceptées du vivant du mandataire. Bien évidemment, avant la prise d’effet du mandat, le mandant ou le mandataire pourront révoquer le mandat de manière unilatérale après avoir notifié leur décision à l’autre partie (article 812-1 -1 al 5 du code civil).

Nous constatons donc que le mandat à effet posthume est soumis à des conditions strictes et revêt obligatoirement la forme d’un acte notarié (article 812-1-1 du code civil) faisant intervenir les deux parties : le mandant (futur défunt) et le mandataire qui accepte expressément. Ses effets sont nécessairement temporaires, généralement 2 ou 5 ans prorogeables une ou plusieurs fois par voie judiciaire. Il n’est valable que s’il est justifié par un intérêt sérieux et légitime qui doit être précisément motivé dans son exposé et qui doit répondre à des problématiques liées par exemple à :

  • L’état des héritiers du mandant (âge (minorité ou majorité trop récente), incapacité, état de santé, éloignement géographique…)
  • Mésentente familiale …

Il est possible de nommer un ou plusieurs mandataires qui auront chacun des missions spécifiques.

Généralement, les pouvoirs du mandataire sont limités aux actes d’administration et de gestion courante. Toutefois, ce dernier pourra demander au juge l’autorisation d’aller au-delà de ses prérogatives. Mais en aucun cas il ne pourra disposer des biens dépendants de la succession.

Le transfert des pouvoirs d’administration et de gestion au mandataire implique nécessairement un contrôle. L’article 812-7 du code civil énonce que « Chaque année et en fin de mandat, le mandataire rend compte de sa gestion aux héritiers intéressés ou à leurs représentants et les informe de l’ensemble des actes accomplis ». Selon la composition du patrimoine, la nomination d’un contrôleur du patrimoine, un expert-comptable par exemple, peut être judicieuse. En effet, le mandataire à effet posthume gère les biens en son propre nom mais ne dispose d’aucun droit réel sur les actifs successoraux soumis au mandat.

 

Bien qu’adapté à tout type de patrimoine, qu’il soit personnel ou professionnel, dans le cas particulier du décès prématuré du chef d’entreprise, un tel acte permet d’éviter que l’activité de ladite entreprise soit paralysée en attendant le règlement de la succession ou la nomination d’un nouveau dirigeant. Le mandat à effet posthume offre donc une solution efficace qui permet au dirigeant de planifier et anticiper sa succession tout en pérennisant l’entreprise et en évitant les conflits entre les héritiers.

Il faut tout de même faire attention au fait que le mandat à effet posthume n’a aucun effet pour remplacer le dirigeant à son décès. D’autres dispositifs comme la désignation d’un dirigeant substitutif, un exécuteur testamentaire ou encore une fiducie permettent d’arriver à ce résultat.